Transcription et traduction

de la seconde partie du sermon des ordinations de Winona

le 20 juin 2008 par Mgr Fellay

Nous remercions le traducteur l'interprète-transcripteur-traducteur qui a fait son travail en toute honnêteté, de même qu'en toute fidélité aux paroles et - en tout cas - à l'esprit de l'orateur. C'est d'ailleurs là le fondement même de la déontologie professionnelle pour un tel travail.

 

Mgr Fellay à Winona (20 juin 2008)

Pas de prêtres, pas de salut. […] Nul ne peut plaire à Dieu sans la foi. Nul ne peut recevoir la grâce sanctifiante sans la foi. La foi est le premier fondement de toute notre vie surnaturelle, donc du paradis, de notre salut. Et cette foi, qu’il nous faut recevoir selon le plan de Dieu, doit être prêchée.

Dans les saintes Écritures, saint Paul parle de la fides ex auditum : la foi, nous la recevons par l’ouïe. Nous l’entendons, ce qui signifie que quelqu’un doit l’enseigner. […]

L’Église a pour première raison d’être la foi. Sa deuxième raison d’être est la transmission des sacrements. Il faut une hiérarchie de prêtres pour transmettre.

Mais surtout, il y a la foi. […] Quiconque veut être sauvé doit avant tout garder la foi, et s’il ne la garde pas intégralement, s’il ne la garde pas pure et totale, sans aucun doute, sans aucun doute, il sera damné.

Et il n’existe pas des centaines de « fois », il n’y en a qu’une : la foi catholique. […] Il y a un combat, et avant tout un combat pour la foi. […] Prêcher la bonne parole de l’Évangile, c’est un combat, car le démon fera tout ce qu’il pourra pour distordre, pour falsifier ce message. Et il suscitera toutes sortes d’obstacles. Il s’y efforcera par tous les moyens : les menaces, l’imagination, l’illusion, n’importe quoi. Il essayera de vous impressionner, de vous forcer à transiger […]

C’est pourquoi l’Église veut que vous soyez forts, car la proclamation de la foi s’accompagne toujours d’une certaine dose de souffrance, qui peut aller jusqu’à la mort. La proclamation de la foi, c’est une affaire de vie ou de mort. […]

Lorsqu’on regarde ce qui s’est passé depuis le Concile… oh oui ! Il y a de quoi avoir peur, et je dirai même d’être mort de peur. Lorsqu’on voit que soudain, les lumières, ceux qui devraient diffuser ces lumières de la Vérité, sont restées sous le boisseau, lorsqu’on voit tout ce travail des missions presque complètement au point mort, on se demande : « Où sont les missionnaires ? »

Et lorsqu’il en reste encore un ou deux, on se demande : « Que font-ils ? » Ils ne prêchent plus, ils n’ouvrent plus la bouche. Il y a même des textes officiels de Rome qui leur demandent de se borner désormais à porter témoignage par leur vie.

C’est pourquoi ces prêches, ces prêches contradictoires, cette proclamation de la Parole de Dieu dans notre monde, tout cela a disparu.

Depuis le Concile, même l’administration de l’Église à Rome, le Saint-Office – nous l’appelons le Saint-Office – a changé de nom. On l’appelle aujourd’hui Congrégation pour la doctrine de la foi, et ce n’est plus le cœur du Vatican.

Depuis la réforme de la Curie par Paul VI, la Secrétairerie d’État a abandonné la foi pour la politique, et cela en dit long…

Et ce combat, ces souffrances que les catholiques endurent dans leur foi, on les retrouve çà et là dans le monde, mais le combat lui-même a presque cessé : maintenant, tout le monde est content de l’Église ; même les autres religions sont contentes d’elle. Tout cela à cause du silence de l’Église… Il ne devrait pas en aller ainsi. Ce n’est pas ce que veut Dieu. Dieu a dit à ses apôtres : « Le monde vous hait, parce qu’il me hait. Le disciple n’est pas au-dessus du maître ». Et nous savons que cette hostilité, ce combat entre l’Église et le monde a été annoncé par Dieu dès le début, depuis le premier péché, le péché originel. Il y a ce combat entre le démon et l’Église, et la très sainte Vierge Marie, et Notre Seigneur. Et cela durera jusqu’à la fin des temps. Il n’y a aucun moyen pour nous d’être en paix avec ce monde et avec le démon. Aucun moyen. Et si quelqu’un prétend être en paix avec le démon, il est perdu.

Nous sommes en guerre, et ce que vous recevez de Dieu en ce jour vous crée l’obligation de la faire. Notre Seigneur a dit à ses apôtres : « Ne craignez rien lorsque vous serez devant vos juges. Le monde vous jugera, les gens vous jugeront quand vous parlerez. Lorsque vous vous tiendrez devant vos juges, ne craignez pas : le Saint Esprit parlera par votre bouche. » […]

Vous attendez sûrement aussi de moi, mes biens chers frères, des informations sur l’évolution de la politique avec Rome. Cette levée des excommunications, va-t-elle se faire, oui ou non ? Franchement, je n’en sais rien. Mon impression actuelle, c’est que nous pouvons encore attendre un moment, et peut-être un bon moment. Pourquoi ? Parce que notre approche de la question n’est pas celle du Vatican.

Il y a vingt ans, lors des consécrations, Mgr Lefebvre disait : « Rome veut la réconciliation, mais par ce mot, elle entend dire que nous devons revenir… à la nouveauté ; or, ce n’est pas ce que nous voulons ! » Il disait : « Leur perspective n’est pas la nôtre, puisque lorsqu’ils parlent de réconciliation, ils pensent à notre intégration dans la nouveauté, et nous ne voulons pas de cela ! »

En 1975, 1976, le problème était déjà le même. Avant la suspension de 1976, Rome a envoyé un ambassadeur à Mgr Lefebvre pour lui demander : « Dites avec moi UNE messe, concélébrez avec moi une SEULE messe, et tout ira bien… »

Mais aujourd’hui, ils ne demandent plus « dites UNE messe », ils disent seulement : « Taisez-vous »…

C’est au point que Rome m’a adressé un ultimatum ; il semble que la dernière lettre aux bienfaiteurs n’a pas été très bien reçue à Rome, où l’on y voit une marque d’orgueil, d’arrogance. Mais nous ne voulons pas de cela, et nous ne nous tairons pas. Nous sommes encore et toujours dans le même combat. C’est toujours la même histoire. Sous des dehors différents, rien n’a changé.

On peut se demander : « Qu’en est-il du Motu Proprio ? Qu’en est-il de la messe ? » C’est une bonne question, assurément. Cette affirmation de la volonté de réintroduire dans l’Église l’ancienne liturgie est une bonne, une très bonne chose, et nous en sommes très, très heureux. Même si, pour l’instant, elle ne trouve pas beaucoup d’applications concrètes.

Je voudrais essayer de vous dire ceci : la messe est la partie visible de ce vaste combat, c’est la partie émergée de l’iceberg. La messe ancienne est la pointe de l’iceberg Tradition. Alors que la nouvelle messe est la pointe de l’iceberg Vatican II et de ces idées modernes qu’ils appellent l’« esprit du Concile »[1]; l’esprit en question est arrivé avec toutes ces réformes, qui ont abaissé l’Église.

Ce nouvel esprit, cette nouvelle manière d’envisager les choses comme si tout était bien, tout était parfait, cette vision positive du monde, des autres religions, cette insistance pour montrer tout ce qu’elles ont de bon… Ce n’est pas faux : il y a de bonnes choses en elles… Mais l’ennui, c’est que dans tout mal, il y a du bon, et même dans le pire, on peut en trouver encore. C’est bien cela le plus dangereux.

Nous savons que quiconque refuse ne serait-ce qu’une seule vérité de notre foi catholique, quand bien même il accepterait toutes les autres, a perdu la foi. On peut bien soutenir qu’il croit en toutes les autres vérités ; s’il en rejette une seule, il n’a pas la foi. Il a des croyances humaines, mais ce n’est pas la foi. Et ces croyances ne le sauveront pas.

C’est comme un avion très bien construit : sans pilote, il ne volera pas. Et l’on peut bien dire : « Mais il a d’excellents moteurs ». Sans pilote, pas de vol. C’est le cas des orthodoxes : ils rejettent le pilote, ils rejettent le pape. Leur avion peut avoir d’excellents moteurs, ils peuvent bien disposer de tous les sacrements. Sans pilote, sans pape, leur avion ne volera pas.

Revenons à notre première image, celle de l’iceberg. Ce qui se passe avec ce Motu Proprio, c’est comme s’ils avaient adopté la pointe de l’iceberg Tradition. Ce que voyant, nous pensons peut-être : « Fort bien, ils ont adopté la pointe, donc ils ont dû adopter aussi tous ce qu’il y a en dessous… » Mais ce n’est pas exactement ce qu’ils ont fait. Ils ont essayé d’enlever cette pointe et de la planter au sommet de l’autre iceberg, celui de la nouvelle religion[2].

On est donc en présence de deux pointes d’iceberg, mais eux disent qu’elles n’en forment qu’une seule. Or, si on essaye d’aller voir ce qui se passe sous la surface de l’eau, on constate qu’ils y maintiennent la nouvelle religion, à l’exclusion de toute autre chose. Et ils appellent cela la « Tradition »…

Cela risque donc de créer une grande confusion. Il y a vingt ans, Mgr Lefebvre, juste avant la cérémonie des consécrations, a donné à Flavigny une conférence devant des séminaristes, et il leur a expliqué alors (ce sont ses propres mots) qu’à l’époque, pour le cardinal Ratzinger, le concile Vatican II, c’était la Tradition. Et c’est ce qu’ils prétendent aujourd’hui. Cela a de quoi déconcerter les esprits.

Lorsqu’on regarde la réalité en face, on constate que tel n’est pas le cas. Ce serait comme de soutenir que les deux pointes d’iceberg en forment une seule. Eh bien non, ce n’est pas le cas. La nouvelle messe, ce n’est pas votre messe. Elle peut être valide, ce qui signifie que la véritable consécration peut se produire, mais tout ce qui fait la nouvelle messe, tous ces gestes, toutes ces paroles débouchent sur quelque chose d’autre[3].

Celui qui a fait la nouvelle messe, Mgr Bugnini, disait alors : « Nous allons retirer à la messe tout ce qui pourrait apparaître comme l’ombre d’un obstacle à nos frères séparés ». Aussi a-t-on retiré à la messe tout ce qui pouvait heurter les protestants. Ils ont fait quelque chose de protestant, au point même que les protestants (comme Max Thurian) disaient : « Désormais, nous autres protestants pouvons suivre la nouvelle messe et l’adopter en tant que service protestant : la chose est logiquement possible ». À Strasbourg, en France, la Confession d’Augsbourg (des luthériens) a invité ses fidèles à adopter le missel de la nouvelle messe pour leur service protestant : il n’y avait à ses yeux absolument aucune difficulté à prendre le texte de la nouvelle messe pour son service protestant. Comment, dans ces conditions, prétendre que la nouvelle et l’ancienne messe soient une seule et même chose ?...

Donc, nous voici, en quelque sorte, à la croisée des chemins, et d’une certaine manière, Rome nous dit : « D’accord, nous sommes prêts à lever les excommunications[4], mais vous ne pouvez pas continuer ainsi ».

Nous n’avons donc pas le choix : nous n’irons pas dans leur sens. Nous poursuivrons dans le même sens. Il y a maintenant quarante ans que nous nous battons afin de maintenir cette foi en vie, afin de conserver cette tradition non seulement pour nous, mais aussi pour l’Église, et nous allons tout bonnement continuer. Quoi qu’il arrive, tout est entre les mains de Dieu.

Si Dieu veut que cette épreuve continue, elle continuera, et Il nous accordera les grâces nécessaires. Il n’y a rien à craindre : nous attendrons des jours meilleurs.

Ce que Mgr Lefebvre disait il y a vingt ans, nous le disons encore aujourd’hui. Bien sûr, nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour que cette foi reste prêchée partout, pour que cette foi, pour que cette tradition retournent vraiment dans l’Église. Nous devons tout faire pour cela, mais rien d’autre. Les temps sont difficiles, mes bien chers frères, mais ce n’est pas nous qui allons y changer quelque chose. Nous subissons ces circonstances, nous ne les avons pas causées. Nous dépendons par conséquent de Dieu. Aussi nous adressons-nous également à la Sainte Vierge Marie.

Nous célébrons aujourd’hui le cent cinquantième anniversaire des apparitions de Notre Dame à Lourdes. Il est impressionnant de songer à toutes ces apparitions : La Salette, Lourdes, Fatima ont reçu les bénédictions de la Sainte Vierge Marie, qui a daigné venir vers nous et nous PARLER, et nous AVERTIR. C’est très clair : il y a dans ses propos un avertissement, une mise en garde : « Quelque chose se passe, quelque chose est en train d’arriver à l’Église, quelque chose de très dur ».

Si l’on examine ce qu’elle a annoncé à La Salette, on constate que nous y sommes en plein. Elle a dit : « ROME PERDRA LA FOI. ELLE DEVIENDRA LE SIÈGE DE L’ANTÉCHRIST. IL Y AURA UNE ÉCLIPSE[5] DE L’ÉGLISE »… Forte paroles ! Et s’il est un temps où nous devons voir cette prophétie se réaliser, c’est bien MAINTENANT. Cela peut empirer, certes.

Nous continuons à penser que l’Antéchrist n’est pas encore là. Cela peut donc devenir encore pire. Et à La Salette, Notre Dame l’a dit. À Fatima, nous savons qu’il y a quelque chose de curieux, de mystérieux, quelque chose comme un vide béant. Nous attendons qu’il soit comblé, et cela viendra, mais nous percevons cet appel urgent de la Sainte Vierge Marie à prier, à s’en tenir aux acquis anciens.

En 1959, sœur Lucie a parlé à l’un des responsables du message de Fatima, un prêtre mexicain. Ce prêtre a fait ensuite à Mexico une conférence sur ce qu’elle lui avait dit, et pour cette raison, il a été déchargé des responsabilités qu’il exerçait comme promoteur de la cause de Fatima. Que lui avait donc dit sœur Lucie ? Elle lui avait dit : « NOUS NE POUVONS PLUS ATTENDRE DES AUTORITÉS DE L’ÉGLISE, DES ÉVÊQUES OU DES PRÊTRES, QU’ILS INVITENT LES FIDÈLES À FAIRE PÉNITENCE, CAR LE MONDE N’A PAS REÇU CES GRÂCES, N’Y A PAS PRÊTÉ ATTENTION. CES GRÂCES SONT DONC RETIRÉES. AINSI CHAQUE ÂME EST-ELLE LAISSÉE À ELLE-MÊME POUR FAIRE SON SALUT. »… Terribles paroles !… Terribles paroles…

Et c’est exactement ce qui se passe à l’heure actuelle. De l’Église officielle, nous n’entendons plus cet appel à faire pénitence. Songeons aux débuts de l’Église, à saint Jean-Baptiste, à saint Pierre, [?] lorsque des fidèles venaient vers eux et leur demandaient « Que dois-je faire ? », ils leur répondaient chaque fois : « Faites pénitence. Convertissez-vous et FAITES PÉNITENCE. Repentez-vous de vos péchés ». Cela, pour l’instant, c’est fini. Je crois que nous sommes les seuls à le dire encore. Avant le Concile, c’était là l’enseignement universel. Partout, nous voyons la croix, qui nous rappelle la mort de Notre Seigneur et la nécessité de suivre la même voie que Lui. Il y a une route large et facile à suivre, nous a dit Notre Seigneur, et nombreux sont ceux qui l’empruntent, mais elle conduit à l’enfer. La voie du paradis est étroite, difficile, jonchée de pierres, et peu en trouvent l’entrée … peu en trouvent l’entrée, l’entrée de cette voie du paradis. Tel est l’enseignement de Notre Seigneur. Notre Seigneur n’a pas dit : « Vivez bien, c’est parfait, vous irez tous au paradis, je paie pour vous, tout va bien… » Ce n’est pas là l’enseignement de Notre Seigneur, ce n’est pas là l’enseignement de l’Église.

Songeons à la Sainte Vierge Marie, qui nous a montré, avec ses apparitions, cet amour, cet amour maternel qu’elle a pour nous. Elle sait que nous allons devoir traverser des temps difficiles. Mais elle est là, elle promet son aide. Elle nous aplanit même le chemin du ciel, par exemple en demandant nos prières des cinq premiers samedis du mois : ce n’est pas trop difficile, et nous avons ainsi la promesse de recevoir – au moment de notre mort – toutes les grâces nécessaires pour aller au ciel, pour faire notre salut. Cette invitation à la dévotion au Cœur Immaculé de Marie… Nous devons aimer notre Mère, notre Mère du ciel, et elle nous aimera bel et bien. En vertu de cette extraordinaire promesse – « À la fin, mon cœur immaculé triomphera » – quoi que fassent les hommes, quoi qu’ils pensent faire, à la fin, le vainqueur, ce sera Dieu… et Sa Sainte Mère. Alors, allons vers la Sainte Vierge Marie. Choisissons le bon camp. Même si cela nous promet des larmes, des épreuves, de la sueur, des souffrances, des persécutions, n’importe quoi. C’est ce que Notre Dame a dit aux petits voyants de Fatima. Elle ne leur pas promis une vie heureuse sur terre, elle leur a promis des temps difficiles… et le ciel à la fin. Demandons cette grâce pour nous aussi : le ciel à la fin, et une vie fidèle, fidèle à Dieu, aux commandements de Dieu, à l’Église. Amen. Au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit.

Amen.



[1]- Ce n’est pas l’esprit du concile, c’est le Concile.

[2]- Et donc pas la religion catholique. Quand le dira-t-il ?

[3]- « d’autre » ! alors catholique ? alors « valide » ! Cela viole le principe de non-contradiction.

[4]- Et après un tel sermon il souhaite être en communion avec ces hérétiques ! Cela viole le principe de non-contradiction

[5]- A-t-il lu comment fonctionne l’éclipse ? Voir L-H Remy, L’Eglise EST éclipsée :

http://www.a-c-r-f.com/documents/LHR-Eglise_EST_eclipsee.pdf .